Marvel Heroes 36 : La fin de « Thor : Fatal Prométhée »
Le « Marvel Heroes » de ce mois se clôt sur le dernier épisode de « Fatal Prométhée », un récit paru à l'origine dans le n°606 de « Thor ». Et, si j’ai pu souligner dans une chronique consacrée à La Torche des origines la dimension prométhéenne de certains récits marvéliens, force est de constater que celui-ci n’offre qu’un écho très lointain avec ce mythe pluri-millénaire.
Le « Prométhée » de Kieron Gillen n’est rien moins que le Docteur Fatalis, ainsi surnommé à cause de la volonté qui est sienne de percer à jour la nature divine des Asgardiens, en se livrant sur eux à des expériences peu ragoûtantes. Mais celles-ci le transforment plus en pâle écho des tortionnaires nazis qu’en un concurrent sérieux du Docteur Frankenstein, et, sur le plan scénaristique, Gillen n’a fait que jouer sur l’analogie facile entre les monstres qu’il crée et les zombies, si à la mode actuellement, que ce soit dans les arts graphiques populaires, au cinéma ou dans les séries télévisées.
Au final, ce « Fatal Prométhée » apparaît donc plus comme un divertissement un peu convenu autour du thème des zombies, et il n’apporte pas beaucoup à l’évolution des personnages. Bien sûr, comme le scénariste le souligne assez lourdement dans les dernières planches, histoire de justifier a posteriori les scènes qu’il s’est cru obligé de dérouler, l’emprise de Loki sur le royaume d’Asgard en sort renforcée. Mais fallait-il pour cela développer sur des pages, d’une part, l’affrontement entre l’armée asgardienne et les morts-vivants de Fatalis, et, d’autre part, la raclée qu’inflige dans un premier temps Fatalis à Thor, avant que celui-ci ne reprenne subitement le dessus, comme un boxeur qui aurait fait mine d’encaisser pour mieux placer l’uppercut qui allait lui donner la victoire ?
Cela n’est pas certain, d’autant plus que Billy Tan, au dessin, se montre parfois inégal. Ses scènes de dialogues et d’attente sont en général plutôt bien construites, et bien menées. Sur la planche reproduite ci-contre, par exemple, la mise en page relativement classique s’accompagne d’une variation constante dans les points de vue, avec une alternance concertée de plans généraux et de gros plans. Les premiers révélent un réel effort de composition par la disposition des personnages, lesquels, dans la deuxième case, se répartissent de l'avant-plan à l'arrière plan, créant une belle profondeur de champ, ou bien, dans la quatrième case, soulignent des lignes de force convergentes, par leurs postures et leurs armes. Les gros plans, quant à eux, se focalisent sur les visages de Balder et Loki, les deux protagonistes qui sont ici au centre de l’interaction narrative.
Ces dessins affichent par ailleurs un réel souci du détail, dans le traitement des fourrures ou des chevelures, par exemple, et, si l’on pouvait émettre certaines réserves sur le travail de Cristina Strain sur le premier épisode, les couleurs de John Rauch et Paul Mounts servent ici au mieux les qualités graphiques du dessinateur.
Par comparaison, des pages comme celles reproduites ci-dessus apparaissent comme moins réussies. Si l’on y retrouve un goût certain du détail sur la personne de Thor et sur le robot, les décors sont en revanche schématiques, et même peu lisibles : les arbres sont tous réduits à de vagues formes noirâtres, et les personnages, lorsqu'ils sont à l'arrière-plan, que ce soit le robot ou Balder, sont tout juste silhouettés. Soient des procédés qui évoquent plutôt l’esthétique du manga que celle du comics. La dernière case de la première planche, et les deuxième et troisième cases de la seconde sont, à ce titre, exemplaires.
S'il manque à ce « Fatal Prométhée », ce regain d'originalité scénaristique qui aurait pu lui donner une véritable identité, et une parfaite finition dans les scènes d'action, la contribution de Kieron Gillen et Billy Tan n'en reste pas moins aussi honnête qu'honorable, vu qu'elle n'est pas dépourvue de qualités par ailleurs.
Et, si vous lisez les comics en V.O., souvenez-vous qu’en ce moment on peut découvrir deux séries limitées liées à la geste de Thor, un « For Asgard » très dépaysant, et un « First thunder », qui constitue un retour aux sources plutôt agréable !
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