Marvel Icons 66 : Jonathan Hickman a-t-il une solution pour les Quatre fantastiques ?
Le numéro d’octobre de « Marvel Icons » nous permet de découvrir enfin le second chapitre de « Une Solution pour tout ». Une suite qui s’est fait attendre puisque les « Quatre Fantastiques » étaient absents de la revue en septembre, alors que le premier épisode de cet arc avait été publié dès le mois d’août. Une bizarrerie de plus dans le planning de Panini…
Comme chacun sait, les ventes de la revue « Fantastic Four » ne cessaient de s’amincir depuis quelques temps. Les personnages apparaissaient un peu ringards à certains, à cause de leurs costumes sortis tout droit d’un film ou d’une série des années 1960-1970, dans le style « Planète interdite » ou « Cosmos 1999 ». Et les récits tournaient un peu en rond, chaque caractère restant fidèle à lui-même, sans réellement évoluer d’un épisode à l’autre.
Enfin, pour couronner le tout, le passage de Mark Millar avait donné le coup de grâce ou, plutôt, de disgrâce, avec « Le Maître de Fatalis », durant l’été 2009. Son scénario délirant, qui faisait de Fatalis un être si puissant qu’il aurait dû être depuis longtemps le maître du monde, posait d’innombrables problèmes par rapport à la continuité narrative, à commencer par le fait que le personnage aurait été à même d'empêcher que ne viennent au monde tous ceux qu’ils savaient destinés à devenir ses ennemis, Red Richards en tête.
Toutefois, il était difficile, sinon impossible, de biffer d’un trait cette série « historique ». Aussi, la tâche a-t-elle été confiée à Jonathan Hickman de la repenser, et de trouver une perspective narrative susceptible de renouveler le titre, afin de séduire un nouveau public – et de reconquérir celui qui avait été perdu.
La première contribution de Hickman à ce projet, « Le Pont », parue en français durant le premier semestre dans « Dark Reign », n’avait guère convaincu. En partie parce que le récit donnait encore l’impression d’être un récit « à la Millar », pleins d’effets aussi spectaculaires que grossiers, visant à empêcher le lecteur de réfléchir. Et en partie, aussi, à cause du dessinateur, Sean Chen, qui multipliait les splashes-pages, mais avec un dessin assez plat, et peu fouillé. Ce qui ne contribuait en rien à rénover la série… et laissait penser que ce pont ne saurait qu’une trouvaille sans lendemain.
C'était se méprendre sur les intentions et le talent de Jonathan Hickman. Avec « Une Solution pour tout », l’invention de Red Richards révèle en effet un réel potentiel narratif. Après un premier chapitre qui s’achevait sur la découverte d’un « Conseil », où siègent des dizaines de Red Richards venus de mondes parallèles, ce deuxième épisode dévoile certaines de ses activités. Or, celles-ci s’avèrent ne pas être toutes si bienveillantes qu’il y paraissait dans un premier temps. Ce qui pourrait expliquer, par ailleurs, que le Conseil se soit attiré la colère des célestes…
Cette « Solution pour tout » se focalise tout naturellement sur Red Richards, dont la personnalité est non seulement approfondie, mais évolue nettement suite aux découvertes qu’il est conduit à faire. Ce qui induit par ricochets certaines tensions au sein des FF, entre autres avec Jane, qui lui tient rigueur de ses absences répétées. Pour explorer ces aspects, Hickman fait alterner les scènes spectaculaires que constituent les incursions hors de la Terre 616 avec des séquences intimistes. Après avoir assisté à une soirée chez les Richards dans le premier chapitre, c’est à leur petit déjeuner du lendemain que nous sommes ici conviés. Si le procédé peut sembler un rien répétitif (et il l'est), il est néanmoins bien mené : chaque personnage a une voix qui lui est propre, avec ses expressions et tournures de phrase, et les dialogues font réellement avancer l'action. On regrette toutefois que la Chose et la Torche restent encore assez stéréotypés dans leur comportement.
Quant à Dale Eaglesham, il se révèle aussi efficace dans les scènes psychologiques, où il sait restituer avec quelques traits les expressions d’un visage, comme la mine boudeuse de Jane (voir le montage ci-contre), que dans les scènes d’action (voir les splashes-pages reproduites plus haut), avec son don pour la composition, la qualité de ses encrages, ou encore un souci du détail qui, cependant, n’entrave pas la lisibilité de l’image. Le tout servi par des couleurs de Paul Mounts bien dans la tonalité du récit, originales, avec des contrastes assez marqués, mais qui ne tombent pas dans la facilité ou le mauvais goût.
Cette « Solution pour tout » pourrait donc bien être, aussi, une solution pour sortir la série de l'impasse dans laquelle elle semblait engagée. Le fait que Jonathan Hickman soit aux commandes pour de longs mois laisse penser qu'il va pouvoir construire un récit qui ne vise pas seulement à en mettre plein les yeux dans l'instant, mais dont les différents éléments finiront par dessiner une trame narrative aussi riche que (ré)novatrice. Reste à confirmer l'essai...
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